La moisissure grise, causée par le champignon Botrytis cinerea, est une maladie importante chez de nombreuses cultures. Botrytis est un champignon ubiquiste considéré comme un parasite de faiblesse ou un saprophyte qui se développe à partir d’une base nutritive constituée de feuilles sénescentes, de fleurs non fécondées et de moignons de feuille laissés à la suite de l’effeuillage ou de la taille des grappes de fruits. Il est rare que Botrytis pénètre directement les tissus sains. La moisissure grise est plus importante chez la tomate de serre que la tomate de champ. Au champ, elle ne se manifeste que si des conditions rencontrées sont très humides et d’une longue durée. Le signe le plus caractéristique de la moisissure grise est la production de conidies abondantes sur les tissus sénescents.
Les conditions favorables au développement de la moisissure grise sont un éclairage insuffisant, une densité de plants élevée, des plants affaiblis ou étiolés, une humidité élevée et une température variant entre 18 et 23 °C. Les symptômes apparaissent généralement en foyer et la maladie se propage rapidement.
En champ, la moisissure grise sur tomate est plus grave si la production est située à proximité d’une culture qui est très sensible à la maladie (ex. : fraisière). En général, les dommages sont peu importants, mais s’aggravent lors de printemps frais et pluvieux, principalement sur les plants nouvellement transplantés. En serre, c’est une maladie fréquente, mais qui peut être limitée si la culture est bien gérée. Lorsqu’elle n’est pas contrôlée, la maladie se propage rapidement et les pertes sont importantes. Les lésions sur la tige sont la première cause de mortalité des plants en serre. La pourriture des fruits survient en serre et en champ et peut se poursuivre après la récolte.
Le champignon hiverne dans le sol et les débris végétaux sous la forme de mycélium, de conidies ou de sclérotes. Les sclérotes de Botrytis peut persister plusieurs années dans le sol. C’est le stade conidie qui est la principale source d’inoculum tandis que les sclérotes affectent surtout les feuilles près du sol. Le champignon est essentiellement dispersé par le vent et les courants d’air, à l’occasion par l’eau (pluie, irrigation par aspersion, condensation), les outils, les insectes et les travailleurs. Les infections ont lieu lorsque les conditions sont fraîches à tempérées (18 et 23 °C), humides (> 95 %) ou lorsqu’un contact est assuré avec de l’eau libre pendant 6 à 24 heures. Le champignon pénètre dans les tissus par des blessures diverses, les tissus sénescents et rarement par les tissus sains. Les fleurs, les fruits et les tissus âgés sont plus sensibles aux infections que les feuilles saines et les jeunes tissus. Une fois à l’intérieur des organes, le champignon avance rapidement et produit une pourriture molle en hydrolysant les substances pectiques. Il devient également très infectieux sur les tissus sains en contact avec son mycélium. Les sclérotes assurent la pérennité de la maladie. En conditions favorables, Botrytis peut sporuler sur des tissus quatre jours après l’infection, ce qui conduit à une propagation secondaire rapide de la maladie.
Tous les organes aériens de la tomate peuvent être affectés, à tout moment de son développement, mais les principaux symptômes se manifestent essentiellement lors de la mise à fruits et sur les tiges.
Plantule : cause de la fonte des semis et des manques à la levée. Les cotylédons sénescents génèrent un support pour Botrytis qui peut ainsi infecter les plantules et causer des chancres de tige sur les jeunes plants.
Feuille : au début, présence de petites taches circulaires, beiges à brun pâle, qui évoluent en des taches zonées sur les folioles ou en forme de « V » à partir de la marge. Les taches progressent sur toute la feuille puis sur le pétiole pour finalement coloniser la tige. Les feuilles se dessèchent puis fanent. Présence d’une sporulation brune à grisâtre sur les tissus affectés.
Fleur : les pétales sénescents sont très sensibles à Botrytis. Ils permettent à Botrytis de se développer sur les fleurs et de les faire pourrir. Les sépales infectés qui demeurent attachés au fruit initient de la pourriture.
Fruit : développement d’une pourriture humide et molle à partir de la zone pédonculaire ou de blessures. Les fruits sont sensibles à l’infection dès le début de leur croissance. Ils développent une pourriture molle et humide et les lésions produites sont plutôt blanchâtres, brun pâle à grises. L’épiderme du fruit se fissure au centre de la pourriture et se couvre de conidies. Les fruits peuvent se momifier. En champ, la moisissure grise se manifeste surtout par la présence de taches fantômes qui correspondent à des attaques avortées. Elle se manifeste par un petit point brun central autour duquel un mince anneau décoloré de 5 à 10 mm de diamètre apparait blanc sur les fruits verts puis jaunes sur les fruits mûrs. Les taches fantômes ne s’agrandissent plus, mais déprécient les fruits. Les taches fantômes sont quand même assez rares et se manifestent surtout sur les fruits verts.
Tige : à partir des cicatrices foliaires ou de plaies de taille, présence de chancres brun pâle à bruns, humides, qui deviennent éventuellement secs. Ils affectent la tige sur une longueur considérable et finissent par ceinturer complètement la tige. Flétrissement potentiel de la partie aérienne située au-dessus des chancres. Présence d’une sporulation brune à grisâtre dont le mycélium devient plus foncé, les lésions noircissent et des sclérotes peuvent apparaître à mesure que le champignon vieillit.
Sur les feuilles, la moisissure grise peut être confondue avec des brûlures ou du dessèchement causés par des problèmes non parasitaires comme une salinité élevée du sol ou le vent. Dans ces cas, il n’y a aucune sporulation sur les tissus.
Sur la tige, les chancres causés par Botrytis peuvent être confondus avec ceux du chancre sec (Acremonium strictum - chancre beige unidirectionnel qui descend toujours vers le bas de la tige et le collet) ou de la sclérotiniose (Sclerotinia sclerotiorum – présence d’un mycélium blanc et de gros sclérotes sur et dans la tige).
Pour contrer le développement de la moisissure grise, il faut éviter les semis trop denses, effeuiller le bas des plants pour diminuer l’humidité et assurer une bonne circulation d’air entre les plants, pratiquer des tailles et des effeuillages par des coupures nettes et au ras de la tige, éliminer les résidus de culture, favoriser l’utilisation de l’irrigation goutte à goutte ou en surface, sinon irriguer par aspersion tôt le matin pour que le feuillage s’assèche, utiliser des cultivars résistants, nettoyer les plants de leurs tissus blessés ou sénescents et assurer une fertilisation équilibrée, particulièrement en azote. En serre, maintenir le chauffage et la ventilation à un niveau adéquat pendant la nuit pour réduire l’humidité. Des traitements fongiques (chimiques et biologiques) sont disponibles. Des traitements préventifs doivent être réalisés au moment de l’effeuillage dans les serres particulièrement humides. Une rotation des familles de fongicides est à privilégier afin de retarder le développement de la résistance. En serre, les chancres de tige sont enlevés et une mince couche de pâte (à base d’argile, de silice ou de fongicide) est appliquée sur et autour des zones infectées. En postrécolte, les fruits doivent être manipulés avec soin afin d’éviter les blessures et refroidis rapidement. Éviter de cueillir les fruits trop mûrs.
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https://www.plantmanagementnetwork.org/pub/php/research/2006/botrytis/