Sur de jeunes plants de vigne, les feuilles terminales sont bosselées, gaufrées et jaunies comme sur la feuille de droite. Les malformations progressent vers l’apex. Les feuilles terminales des rameaux axillaires ne sont pas affectées. Les tests de laboratoire se sont avérés négatifs pour la détection de virus et de phytoplasmes. Le résultat des analyses effectuées par le Laboratoire d'expertises et d'analyses alimentaires (LEAA) du MAPAQ a permis de détecter les herbicides imazéthapyr et bentazone des feuilles. Les quantités d’imazéthapyr retrouvées sont suffisantes pour occasionner les symptômes observés. La conseillère agricole mentionne que les vignes sont cultivées dans un sol argileux avec un drainage passable. Tous les plants d’un cultivar sont affectés.

Description

Les herbicides du groupe 2 regroupent des produits inhibiteurs d’une enzyme, l'acétolactate synthase (ALS) ou acétohydroxyacide synthase (AHAS), impliquée dans la synthèse de trois acides aminés essentiels (valine, isoleucine et leucine). Les herbicides de ce groupe se répartissent en quelques familles, soient : les imidazolinones (ex.: imazéthapyr, imazamox, etc.); les sulfonylurées (ex.: chlorimuron-éthyle, nicosulfuron, etc.); les sulfonylamino carbonyl triazolinones (ex.: thiencarbazone, etc.); les sulfonanilides ou triazolopyrimidines (TPS) (ex.: cloransulam, flumetsulam, etc.) et les acides pyrimidyl(thio) benzoates (ex.: pyrithiobac, etc.). Les herbicides de ce groupe peuvent avoir une activité foliaire ou être appliqués directement au sol. Ils sont transportés dans le phloème et dans le xylème. Les plantes sensibles arrêtent leur croissance dans les heures suivant l’application de ces herbicides. Les symptômes de phytotoxicité apparaissent dans les une à trois semaines suivant l’application foliaire ou suite à l’activité résiduelle (rémanence) des herbicides dans le sol.

En sol humide, les herbicides du groupe 2 sont plus facilement décomposés et absorbés par les plantes. La rémanence est plus grande dans les sols à pH faible. L'activité microbienne et la dégradation augmentent de pair avec le pH du sol. La vitesse de dégradation augmente dans les sols à pH élevé parce que le produit chimique n'est pas adsorbé sur les particules de sol; il est donc assimilable par la plante et livré à la dégradation par les microbes.
 
Dans le monde, des populations de plus de 165 espèces de mauvaises herbes (dicotylédones et graminées confondues) ont déjà montré une résistance aux herbicides du groupe 2. C’est le groupe d’herbicides pour lequel on retrouve actuellement le plus de populations de mauvaises herbes résistantes. Aux États-Unis, la résistance a touché plus de 48 espèces de mauvaises herbes alors qu’il y en a plus de 27, au Canada.

Cas Imazéthapyr - Cet herbicide est utilisé pour réprimer les graminées et les feuilles larges dans la culture des légumineuses , le canola et le maïs (tolérants à l'imazéthapyr). Il n’est pas homologué chez la vigne. Il peut être appliqué en présemis, prélevée ou postlevée et est absorbé prioritairement par les feuilles et plus lentement par les racines. La translocation est davantage assurée par le phloème que le xylème. Les symptômes typiques de phytotoxicité (coloration pourpre ou jaunissement, nécroses) peuvent n’apparaître qu’une à deux semaines ou plus suivant l’application, selon les conditions de croissance et la vulnérabilité des espèces présentes. La présence des nervures violacées est très révélatrice et traduit des conditions environnementales de stress.

Concernant l’imazéthapyr, c’est plus de 20 espèces de mauvaises herbes ayant montré de la résistance à cette matière active, aux États-Unis. Disséminées au Canada, on retrouve la moutarde des champs (Sinapis arvensis), la bourse-à-pasteur (Capsella bursa-pastoris), le tabouret des champs (Thlapis arvense), la sétaire verte (Setaria veridis), la renouée à feuilles de patience (Polygonum lapathifolium), le gaillet mollugine (Galium spurium), et plus particulièrement au Québec, l’amarante tuberculée (Amaranthus tuberculatus), l’amarante de Powell (Amaranthus powellii), l’amarante à racine rouge (Amaranthus retroflexus), la sétaire géante (Setaria faberi), la morelle noire de l’Est (Solanum ptychantum), la petite herbe-à-poux (Ambrosia artemisiifolia) ainsi que le chénopode blanc (Chenopodium album) qui ont montré de la résistance à l’imazéthapyr.

 

Ne pas confondre

La phytotoxicité par l’imazéthapyr peut être confondue avec une carence minérale, les phytoplasmes, les virus et une phytotoxicité par un herbicide des groupes 5 (terbacil) ou 9 (glyphosate).

Prévention

Pour diminuer les risques de phytotoxicité, il faut éviter les dérives sur les cultures lors de l’application, utiliser des jets dirigés au besoin, ne pas appliquer par temps venteux, respecter les consignes inscrites sur l’étiquette et bien nettoyer le pulvérisateur. À cause de la rémanence de l’imazéthapyr, les cultures qui peuvent succéder à un traitement à cet herbicide sont le blé de printemps, le blé d’hiver, le haricot (commun, sec, de Lima, et adzuki), le maïs de grandes cultures ou tolérant à l’imazéthapyr, l’orge de printemps, le pois de transformation et le soya.

Dommage

Feuille : présence de jaunissement, de blanchiment, de rougissement ou d’une couleur violacée du limbe ou entre les nervures.
 
Racine : ont une faible croissance ou un développement ralenti. Mort potentielle du système racinaire.
 
Plant : présente du nanisme.

Références et liens

Scalla, R. et coll. (1991). Les herbicides : mode d’action et principes d’utilisation. Paris : Institut national de la recherche agronomique INRA (Éditeur). Collection : du labo au terrain. Paris, France. 450 pp.
 
Shaner D.L. (Ed) (2014). Imazethapyr. Dans Herbicide handbook. 10e éd. Weed science society of America, Lawrence, Kansas. p. 262-263.

http://weedscience.org/Summary/ResistbyActive.aspx