La face inférieure d’une feuille de soya montre une coloration pourpre des nervures. Ces symptômes sont attribuables à un résidu de l’herbicide PERMIT® WG (halosulfuron) dans le réservoir du pulvérisateur. Ce dernier n’aurait pas été nettoyé adéquatement, suite à sa pulvérisation, dans un champ voisin.

Plant de soya montrant une nervation pourpre à la face inférieure des feuilles. Ces symptômes sont attribuables à un résidu de l’herbicide PERMIT® WG (halosulfuron) dans le réservoir du pulvérisateur. Ce dernier n’aurait pas été nettoyé adéquatement, suite à sa pulvérisation, dans un champ voisin.
 

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Soya - halosulfuron (ester méthyle) (2)_2
Description

Les herbicides du groupe 2 regroupent des produits inhibiteurs d’une enzyme, l'acétolactate synthase (ALS) ou acétohydroxyacide synthase (AHAS), impliquée dans la synthèse de trois acides aminés essentiels (valine, isoleucine et leucine). Les herbicides de ce groupe se répartissent en quelques familles, soient : les imidazolinones (ex.: imazéthapyr, imazamox, etc.); les sulfonylurées (ex.: chlorimuron-éthyle, nicosulfuron, rimsulfuron, etc.); les triazolopyrimidines (TPS) de type 1 (flumetsulam, cloransulam-méthyle, etc.); les triazolopyrimidines (TPS) de type 2 (ex.: pyroxulam, etc.); les triazolinones (thiencarbazone-méthyle); les pyrimidyl(thio) benzoates (ex.: pyrithiobac de Na, etc.); et les sulfonalnilides (ex: pyrimisulfan, etc.). Les herbicides de ce groupe peuvent avoir une activité foliaire ou être appliqués directement au sol. Ils sont transportés dans le phloème et dans le xylème. Les plantes sensibles arrêtent leur croissance dans les heures suivant l’application de ces herbicides. Les symptômes de phytotoxicité apparaissent dans les une à trois semaines suivant l’application foliaire ou suite à l’activité résiduelle (rémanence) des herbicides dans le sol.

En sol humide, les herbicides du groupe 2 sont plus facilement décomposés et absorbés par les plantes. La rémanence est plus grande dans les sols à pH faible. L'activité microbienne et la dégradation augmentent de pair avec le pH du sol. La vitesse de dégradation augmente dans les sols à pH élevé parce que le produit chimique n'est pas adsorbé sur les particules de sol; il est donc assimilable par la plante et livré à la dégradation par les microbes.
 
Cas Chlorimuron-éthyle (CLASSIX 25 DF) - le chlorimuron-éthyle, contenu dans l’herbicide GUARDIAN PLUS WDG, est homologué dans la culture du soya conventionnel ou tolérant au glyphosate. C’est un herbicide utilisé en présemis ou en prélevée (après le semis) pour lutter contre les mauvaises herbes à feuilles larges.

L'utilisation du GUARDIAN sur des plantes stressées par des conditions climatiques difficiles avant ou après le traitement peut occasionner les symptômes observés. La présence des nervures violacées est très révélatrice. Une autre possibilité est la sensibilité variétale. Les cultivars ne sont pas tous testés et il arrive que certains soient plus sensibles que d'autres.

Aux États-Unis, une dizaine d’espèces de mauvaises herbes ont développé de la résistance au chlorimuron-éthyle. Au Canada et au Québec, il ne s’agit pour l’instant que d’une seule espèce : la petite herbe-à-poux (Ambrosia artemisiifolia).

Cas PERMIT (halosulfuron (ester méthyle)) – Le PERMIT® WG est homologué dans la culture du haricot sec, du maïs, du sorgho et du millet. C’est un herbicide sélectif qui permet de réprimer les dicotylédones et le souchet. Il peut être appliqué en prélevée ou en postlevée. Le produit est absorbé par les racines, les nouvelles pousses et les feuilles et est véhiculé dans la plante. Un résidu de cet herbicide sur la culture du soya peut provoquer une anomalie de coloration (jaunissement, coloration pourpre des nervures à la face inférieure des feuilles) et une déformation des feuilles.

Concernant le halosulfuron (ester méthyle), sept espèces de mauvaises herbes, incluant l'amarante tuberculée (Amaranthus tuberculathus) et plusieurs espèces de cypéracées ont développé de la résistance à cette matière active aux États-Unis. Aucune résistance n'a été répertoriée actuellement au Canada et au Québec.

Cas PURSUIT (imazéthapyr) - Le PURSUIT® est homologué dans la culture du soya, des légumineuses et du maïs tolérant l’imazéthapyr. C’est un herbicide sélectif qui permet de réprimer les dicotylédones et les graminées annuelles. Il peut être appliqué en prélevée ou en postlevée. Le produit est absorbé rapidement par le feuillage (environ 90% dans les 24 heures suivant l’application) alors que l’absorption est plus lente par les racines. Le produit est véhiculé dans la plante principalement via le phloème mais aussi par le xylème. L’imazéthapyr inhibe la division cellulaire et la croissance mais les symptômes ne sont souvent visibles qu’une à deux semaines suivant l’application. Il y a jaunissement des régions méristématiques et aussi un jaunissement qui débute à la marge des feuilles, autant basales que terminales, avec quelques fois une déformation, puis une nécrose des tissus. Une coloration pourpre des nervures est apparente à la face inférieure des feuilles. L’application de l’herbicide PURSUIT en postlevée sur le soya peut causer un retard de croissance, dû au raccourcissement de la tige entre les noeuds, mais ne devrait pas entraîner de baisse du rendement.

Concernant l’imazéthapyr, c’est plus de 20 espèces de mauvaises herbes ayant montré de la résistance à cette matière active, aux États-Unis. Disséminées au Canada, on retrouve la moutarde des champs (Sinapis arvensis), la bourse-à-pasteur (Capsella bursa-pastoris), le tabouret des champs (Thlapis arvense), la sétaire verte (Setaria veridis), la renouée à feuilles de patience (Polygonum lapathifolium), le gaillet mollugine (Galium spurium), et plus particulièrement au Québec, l’amarante tuberculée (Amaranthus tuberculatus), l’amarante de Powell (Amaranthus powellii), l’amarante à racine rouge (Amaranthus retroflexus), la sétaire géante (Setaria faberi), la morelle noire de l’Est (Solanum ptycanthum), la petite herbe-à-poux (Ambrosia artemisiifolia) ainsi que le chénopode blanc (Chenopodium album) qui ont montré de la résistance à l’imazéthapyr.

Cas PEAK (prosulfuron) – Le PEAK®est homologué dans la culture du maïs, du blé, du sorgho et du millet. Il est utilisé en postlevée de la culture, entre les stades deux à sept feuilles. Cet herbicide permet de réprimer les feuilles larges annuelles et les vivaces. Le produit est absorbé par les feuilles et est rapidement transloqué vers les points de croissance de la plante. Le soya est extrêmement sensible au prosulfuron. Une dérive de cet herbicide sur le soya provoque habituellement une anomalie de coloration (jaunissement, rougissement des nervures à la face inférieure des feuilles), un faible développement (feuilles petites, courts entrenoeuds) et à une dose élevée, la mort du bourgeon apical. Les symptômes au champ présentent un gradient allant du plus affecté au moins affecté, à mesure que l’on s'éloigne de la zone de dérive.

Pour le prosulfuron, on fait mention de trois espèces de mauvaises herbes, soit l’amarante tuberculée (Amaranthus tuberculatus), la petite herbe-à-poux (Ambrosia artemisiifolia) et la grande herbe-à-poux (Ambrosia trifida) qui ont montré de la résistance aux États-Unis. Au Canada, pour l’instant seule la morelle noire de l’Est (Solanum ptycanthum) a développé de la résistance alors qu’on ne rapporte aucune résistance au Québec.

Ne pas confondre

La phytotoxicité causée par les herbicides du groupe 2 peut être confondue avec les symptômes résultant d’une compaction du sol, de l’application au sol d’ammoniac anhydre (NH3), des dommages causés par les nématodes ou d'une carence en phosphore. Quant au jaunissement internervaire, il peut être confondu avec une carence en magnésium, une caractéristique variétale, un stress dû au froid ou à l’humidité, ou encore à un semis trop superficiel.
 
Les symptômes des herbicides sulfonylurées peuvent être confondus avec les symptômes provoqués par d’autres familles d’herbicides telles que les imidazolinones, les acides benzoïques, les dinitroanilines ou les acides phénoxy-carboxiliques.

Cas CLASSIC 25 DF (chlorimuron-éthyle) - la phytotoxicité par le chlorimuron-éthyle peut être confondue avec une carence minérale ou une phytotoxicité par un herbicide des groupes 5 (terbacil) ou 9 (glyphosate).

Cas PURSUIT (imazéthapyr) - La phytotoxicité par l’imazéthapyr peut être confondue avec une carence minérale (Mn, K, Fe), les symptômes provoqués par les sols froids, les sulfonylurées (chlorimuron-éthyl, thifensulfuron-méthyl, halosulfuron - groupe 2) et dérivés d'acides aminés (glyphosate - groupe 9) .
 

Prévention

Pour les herbicides du groupe 2 en général, il est très important de nettoyer soigneusement le réservoir du pulvérisateur (et la rampe) avec un produit de nettoyage recommandé à l’étiquette du produit.

Il faut éviter les dérives sur les cultures lors de l’application d'herbicide, utiliser des jets dirigés au besoin, ne pas appliquer par temps venteux et respecter les consignes inscrites sur l’étiquette.
 
Cas CLASSIC (chlorimuron-éthyle) - Dans le cas des sulfonylurées, à l'exemple du chlorimuron-éthyle, il faut éviter d’appliquer ces herbicides à une température inférieure à 10 °C ou supérieure à 30 °C et ne pas appliquer sur des plants en mauvais état (carencés, grêlés, touchés par un ravageur, etc.). On évite les associations avec les dérivés auxiniques. Le risque de phytotoxicité serait accentué dans les sols noirs et riches en matière organique.

Cas PURSUIT (imazéthapyr) - Dans le cas des imidazolinones comme l’imazéthapyr, il faut éviter d’appliquer ces herbicides sur des plants en état de stress (conditions d’humidité et température élevées) car ceux-ci métabolisent plus lentement les produits ce qui peut engendrer des symptômes de phytotoxicité. Il est aussi déconseillé d’appliquer l’imazéthapyr sur des sols contenant moins de 2% de matière organique. Enfin, ne semer que les cultures recommandées l’année qui suit l’application de cette matière active.
 

Dommage

Feuille : nervures du limbe violacées, jaunissement des feuilles pouvant apparaître à la face supérieure ou inférieure, feuilles quelques fois plissées.
 
Tige : anomalie de coloration (brunissement de l’intérieur de la tige et brunissement à l’aisselle des feuilles), sénescence du nœud liant le pétiole à la feuille. Dans les cas graves de phytotoxicité, nécrose du point de croissance apical.
 
Racine : malformations ou inhibition du système racinaire.
 
Plant : nanisme, retard ou arrêt de croissance à la suite d'une application d'herbicide en postlevée.

Références et liens

Ladlie J. S. (1991). Imidazolinones. Dans Guide to herbicide injury symptoms in soybeans with « look-alike » symptoms. Agri-Growth Research inc., Hollandale, Minnesota. p. 19-20.

Ladlie J. S. (1991). Sulfonylureas. Dans Guide to herbicide injury symptoms in soybeans with « look-alike » symptoms. Agri-Growth Research inc., Hollandale, Minnesota. p. 29-31.

Shaner D.L. (Ed) (2014). Chlorimuron-ethyl. Dans Herbicide handbook. 10e éd. Weed Science Society of America, Lawrence, Kensas. p. 94-95.

Shaner D.L. (Ed) (2014). Halosulfuron-methyl. Dans Herbicide handbook. 10e éd. Weed Science Society of America, Lawrence, Kensas. p. 245-246.

Shaner D.L. (Ed) (2014). Imazethapyr. Dans Herbicide handbook. 10e éd. Weed Science Society of America, Lawrence, Kensas. p. 262-263.

Shaner D.L. (Ed) (2014). Prosulfuron. Dans Herbicide handbook. 10e éd. Weed Science Society of America, Lawrence, Kensas. p. 380-382.

http://www.ipm.iastate.edu/ipm/icm/1997/6-16-1997/driftinj.html

http://weedscience.org/Summary/ResistbyActive.aspx

http://pr-rp.hc-sc.gc.ca/1_1/view_label?p_ukid=140236151

http://pr-rp.hc-sc.gc.ca/1_1/view_label?p_ukid=140614818